L'Olympiade internationale de Biologie 2008 à Mumbai, Inde (Bombay) fut une grande édition : une bonne organisation, des questionnaires de très grande qualité, faisant largement appel à la réflexion - et un dépaysement total, parfois même un peu dur à avaler...
Et, cerise sur le gâteau, deux médailles belges : du bronze francophone, de l'argent flamand. Ce n'est que la deuxième médaille d'argent belge, pour laquelle il aura fallu attendre... 14 ans !
Nous vous proposons, pour illustrer tout cela :
- un communiqué des organisateurs ;
- un compte rendu des étudiants ;
- les résultats complets (*.pdf)
- quelques photos (à venir).
Nous vous souhaitons d'y prendre autant de plaisir que nous!
L’argent et le bronze pour les Belges en Inde !
A l’Olympiade internationale de Biologie 2008, nos jeunes talents s’éclatent.
Bombay et son choc culturel n’ont pas suffi à désarçonner les 4 talentueux jeunes biologistes qui représentaient la Belgique à l’Olympiade internationale de Biologie. C’est en effet dans la capitale économique de l’Inde que vient de se dérouler, du 13 au 20 juillet 2008, cette compétition de haut niveau – en quelque sorte des jeux olympiques de la biologie – destinée aux élèves de fin d’enseignement secondaire.
Ce sont 220 jeunes de 17-18 ans représentant cinquante-cinq pays issus des cinq continents s’y sont affrontés dans la plus parfaite des amitiés, donnant ainsi un bel exemple d’ouverture et de fair-play. Il s’agit là de la crême de la jeune science biologique mondiale. La Belgique avait envoyé 4 représentants, deux francophones sélectionnés lors de l'Olympiade de biologie, deux flamands issus de la Vlaamse Biologie Olympiade.
Après une semaine d'épreuves tant théoriques que pratiques, le palmarès a livré son verdict : 60 % des participants sont médaillés, ce qui donne 23 médailles d’or, 47 médailles d’argent, 68 médailles de bronze.
Surprise bien agréable : deux des quatre belges sont médaillés : Justine Laverdeur (Centre scolaire St François Xavier, Verviers) s’attribue un médaille de bronze (90e place, 52,17 points) tandis que Matthias Vanduren (St. Jan Berchmanscollege, Diest) fait mieux encore en décrochant de l’argent, en 51e position (55,77 points)
Pour situer, voici les extrêmes : le premier classé est le coréen Tae Young Choi avec 68,20 points, le dernier est tadjik : Hilola Hakimova, 220e, 29,92 points.
L'organisation d’une Olympiade
L'Olympiade de Biologie vise donc les étudiants de fin de secondaire. Elle se déroule chaque année dans un pays différent. Tous les domaines de la biologie - et spécialement les plus pointus - font l'objet d'une batterie d'épreuves, théoriquement au niveau de l'enseignement secondaire, mais en fait souvent digne d'une deuxième année d'université !
Cette année, les quatre épreuves de laboratoire – chacune d’une heure – portaient ainsi sur l’anatomie et la physiologie végétales (par exemple corréler l’anatomie de plantes et leur habitat, en faisant une coupe, en l’examinant au microscope, en réfléchissant !), sur l’anatomie et physiologie animales (comparer des systèmes squelettiques d’animaux, en établir une classification) mais aussi sur la biochimie (étudier l’activité d’une enzyme et son inhibition, la corréler avec la résistance de bactéries aux antibiotiques) et enfin le comportement animal, analysé grâce à des enregistrements vidéo (étudier la réponse olfactive de larves de mouche, étudier le comportement d’un poisson).
Une centaine de questions de théorie, administrées en deux sessions, couvraient tous les domaines : la biologie cellulaire, la physiologie et l'anatomie végétales, la physiologie et l'anatomie animales, la génétique, l'écologie, la systématique, le comportement animal...
L’ensemble de ces épreuves étaient remarquablement conçues, exigeant beaucoup de réflexion au-delà des simples connaissances. Mais c’est justement cela qui a permis aux Belges de briller mieux que d’autres années : souvent, la connaissances pure est trop privilégiée et nos étudiants – comptant en moyenne 2 heures hebdomadaires de bio – sont désavantagés par rapport à d’autres nations aux formations intenses et spécialisées : parfois jusqu’à 9 h de bio par semaine.
Amitiés et camaraderie
Un des points cruciaux de l’Olympiade internationale de Biologie, c’est de permettre la rencontre d’autres cultures. Nos étudiants en sont encore tout émerveillés : rencontrer d’autres jeunes de leur âge, c’est un merveilleux moyen de tordre le cou à des préjugés.
Bombay n’est pas une ville de tourisme, mais les participants l’ont découverte avec chaleur. Ils restent ravis, par exemple, d’avoir vu au centre de sciences de Bombay les enfants venir serrer la main des étrangers qu’ils étaient. La largeur d’esprit des Indiens a aussi impressionné nos étudiants : ils sont a priori très ouverts, et ne manifestent pas de préjugés basés sur l’allure ou l’habillement.
Un autre aspect à souligner, c’est tout simplement l’excellente ambiance qui règne dans la délégation belge, entre francophones et flamands.
Quelles leçons pour notre enseignement ?
Y a-t-il des leçons à tirer des résultats de nos étudiants, spécialement des francophones ? En première analyse, soyons positifs : les connaissance limitées de nos étudiants sont compensées par une bonne capacité à analyser et à résoudre des problèmes. Notre enseignement secondaire se veut « général » et il réussit au moins en cela.
D’autre part, il est clair que l’absence quasi totale de travaux pratiques dans le secondaire supérieur belge francophone est une tare – et pas seulement pour cette compétition internationale. La Biologie, à l’instar des autres sciences naturelles, se comprend bien quand on manipule, observe, analyse. Toutes activités qui se font idéalement lors d’activités de labo, et pas devant le tableau noir.
Enfin, constatons que les nations « qui en veulent » misent à fond sur l'éducation des générations montantes ; qui leur donnerait tort ? Notre pays microscopique sans ressources naturelles ne peut, lui aussi, finalement compter que sur sa matière grise pour asseoir son avenir. L’Olympiade internationale de Biologie confirme donc que la Belgique n’est pas nulle, mais devrait sans tarder réinvestir massivement dans son système éducatif. Et pas tellement en y mettant de l’argent, mais plutôt en favorisant des attitudes innovatrices dans les classes. Tout un défi, qu’il nous faudra relever !
Gérard Cobut
IBO 2008 - Le compte rendu des étudiants
On se sent fort, premiers et deuxième sortis d'une finale nationale de biologie. L'internationale est à nous, et la Science de la vie semble plus que jamais à notre portée, maîtrisée ou du moins maîtrisable, apprivoisée. C'est ainsi que, relativement confiants, nous sommes partis pour l'Inde, récompense suprême qui nous avait fait rêver - et suer - pendant une demi-année, bien décidés à montrer à 54 autres délégations de quatre étudiants venus des quatre coins du globe, de quel xylème secondaire (communément appelé bois) les P'tits Belges se chauffent.
Bien sûr, on nous l'avait dit, bien sûr on le savait. Évidemment, les mots de notre "boss-olympiade" : "Dans cette compétition, il y a les amateurs et les professionnels... et vous faites partie de la première catégorie" avaient été entendus par notre raison et nous répétions, à tous les doux rêveurs qui nous demandaient si on ramènerait une médaille d'argent ou d'or, qu'on ramènerait celle de papier.
Mais il faut l'avoir vécu, pour y croire. Avoir pesté sur des coupes de tiges pas assez fines pour laisser passer la lumière, tenté de compter des larves récalcitrantes qui se cachent comme par jeu dans les coins, fait des puzzles géants avec des squelettes d'animaux, appris tout-à-coup l'existence d'un pan entier de la biologie sur une question théorique et avoir attrapé des maux de tête à force de compter, calculer, déchiffrer, analyser, deviner, douter et tout recommencer pour voir l'énorme autoroute encore à découvrir par rapport au petit chemin parcouru. Non, l'IBO, ce n'est pas piqué des hannetons.
Et malgré tout, ce serait tellement réducteur d'en conclure que ce ne fut pas une vraie et inoubliable partie de plaisir ! A tous les niveaux.
A celui des épreuves en elles-mêmes, d'abord, avec le défi constant auxquelles elles nous soumettaient, nous incitant à donner toujours plus, comprendre et agir toujours plus vite, réfléchir toujours plus fort. Comment décrire le stress précédant ces épreuves, l'adrénaline qui coule délicieusement dans les veines ou la soudaine complicité internationale qui naît dans l'adversité d'un test déconcertant ?! Ou encore les discussions animées quand les quatre élèves se retrouvent enfin, au terme de la journée de tests qui les avait séparés, et échangent les difficultés, les succès et les échecs (surtout les échecs, dans notre cas...) !
Ensuite, parlant de ces discussions animées, il ne faut pas oublier l'excellente entente au sein de notre délégation, qui baragouinait joyeusement un mélange d'anglais, de néerlandais et de français - chacun ayant appris à jurer dans les trois langues, belgitude oblige ! Quelles heures délicieuses passées à résoudre des problèmes de biologie, s'expliquer des points de matière mal compris, étudier au bord de la piscine et - last but not least - à se raconter nos vies, des blagues ou nos expériences.
Et puis, il y a les autres. Nos adversaires, diront certains, que nous n'avons par ailleurs aperçus pour la première fois que lorsqu'ils venaient retirer une médaille, d'or comme il se doit. Les autres, la grande majorité des 216 autres étudiants, âgés de 15 à 19 ans, que nous avons rencontrés, se diront compagnons, camarades, amis parfois, même. Ces autres ont rempli les salles de bruits et de conversations multilingues, échangé des cadeaux typiques, originaux ou délicieux - ou les trois à la fois, dessiné leurs impressions sur le "tableau à scribouillis" et pris les adresses les uns des autres, pour que nous puissions nous retrouver, maintenant ou un jour lointain, et nous souvenir de ces bons moments.
Enfin, il y a le pays. Qui a été plus que le décor de la compétition, une partie entière du séjour, et lui a donné sa couleur et sa saveur. Saveur épicée, d'ailleurs, des plats typiques servis à tous moments de la journée et nous torturant parfois la bouche - et le reste... L'Inde, au-delà de sa cuisine, restera surtout pour nous le souvenir d'un pays accueillant et coloré, aux routes intraversables, et aux guides inoubliables (Minti, si tu nous entends...).
Et toute cette joie, savamment orchestrée, entre organisation indispensable de la compétition et joyeux désordre des moments de détente a été rendue possible par le dévouement, ici et ailleurs, d'une poignée - oh, vraiment, pas beaucoup plus - de passionnés de Science et de rencontres. Merci à eux, merci à tous !
Justine Laverdeur et Xavier Gavilan